Spécialiste du droit du travail, directeur de l’Institut d’études avancées de Nantes, Alain Supiot publie un essai, reprenant la déclaration de Philadelphie, traitant de l’opposition entre mondialisation et droit social. Plusieurs medias ont traité de cet ouvrage, considéré comme un événement par des commentateurs. Il donne des clés, d’analyse et d’action, sur la mondialisation et la justice sociale au niveau international.
La déclaration de Philadephie
En 1944, la Conférence internationale du travail, réunie à Philadelphie, aux Etats-Unis, a adopté une déclaration qui redéfinit les buts et objectifs de l’Organisation internationale du travail (OIT) en énonçant notamment les principes suivants :
le travail n’est pas une marchandise,
la liberté d’expression et d’association est une condition indispensable d’un progrès continu,
la pauvreté, où qu’elle existe, constitue un danger pour la prospérité de tous,
tous les êtres humains, quels que soient leur race, leur croyance ou leur sexe, ont le droit de poursuivre leur progrès matériel et leur développement spirituel dans la liberté et la dignité, dans la sécurité économique et avec des chances égales.
L’esprit de Philadelphie, la justice sociale face au marché total
Lors d’un entretien avec Le Monde des Livres, Alain Supiot explique que les valeurs de justice sociale sont remises en cause par la mondialisation. Or c’est l’analyse des causes de la seconde guerre mondiale qui avait conduit à cette prise de position internationale. « Pour éviter les fureurs identitaires et favoriser la paix, il fallait affirmer la dignité humaine, se préoccuper des conditions de vie et donc de justice sociale« . La déclaration de Philadelphie est contemporaine du programme du Conseil National de la Résistance, en France, qui a abouti au « modèle social français », dont la fin a été demandée par M Kessler, ancien vice-président du Medef.
Mais depuis trente ans, notamment avec la création de l’Organisation mondiale du commerce, « on s’efforce d’adapter les êtres humains à une organisation déréglementée posée comme une fin en soi« . La mondialisation vue par les ultra-libéraux et les post-communistes est une nouvelle doxa, qui « prône le démantèlement de toute frontière pour les marchandises et les capitaux, tandis que de nouvelles barrières sont érigées chaque jour contre la circulation des hommes ». Et sans barrières commerciales, une grande région comme l’Afrique ne peut se développer.
Au niveau européen, Alain Supiot dénonce le virage pris par la Cour de Justice européenne, qui a favorisé le dumping social et fiscal des anciens pays de l’Est.
Les voies d’avenir, pour permettre le rétablissement de la justice sociale, sont:
- la limite: « le sens des limites, sans lesquelles il n’est pas d’ordre juridique possible : l’Etat de droit est incompatible avec le marché des normes. »
- la mesure: « au lieu de céder aux mirages de la quantification »
- la solidarité « redonner une place forte à la solidarité civile (comme les mutuelles en France), sans la vitalité desquelles la sécurité sociale est condamnée à la faillite.
- l’action,
- la responsabilité.
Il a été professeur à la faculté où j’étais étudiante !
Il avait déjà son fan-club pour la qualité de son analyse !
Je vais chercher son livre !
Mamouchka.