L’histoire rencontre d’étranges échos dans l’actualité. Le Second Empire, avec son pouvoir autoritaire, paraît inspirer nos dirigeants actuels. Plusieurs articles de presse ont fait allusion à la culture bonapartiste de la droite actuelle, à sa conception d’un pouvoir autoritaire, prônant le développement économique, le « enrichissez-vous » recouvrant le « taisez-vous ».
‘ »Histoire d’un Crime » de Victor Hugo est réédité aujourd’hui. Ce livre relate le coup d’État du 2 décembre 1851 , par lequel Napoléon III mit fin à la seconde République. Une émission de France Culture lui a été consacrée.
La période du Second Empire est de plus en plus présentée comme une période faste, d’enrichissement économique, de développement de l’industrie de notre pays.
Mais l’Empire présente une face sombre. Il a les mains ensanglantées, du sang des Républicains, qui ont combattu pour la Démocratie.
Les premières phrases du texte de Victor Hugo décrivent l’incrédulité d’un républicain devant cette perspective, quand les rumeurs deviennent plus persistantes.
« Violer le droit, supprimer l’Assemblée, abolir la Constitution, étrangler la République, terrasser la nation, salir le drapeau, déshonorer l’armée, prostituer le clergé et la magistrature, réussir, triompher, gouverner, administrer, exiler, bannir, déporter, ruiner, assassiner, régner, avec des complicités telles que la loi finit par ressembler au lit d’une fille publique, quoi ! toutes ces énormités seraient faites ! et par qui ? par un colosse ? non ! par un nain. »
Les massacres, oubliés aujourd’hui, suivront dans ce témoignage.
Voici la présentation du livre par l’éditeur:
Victor Hugo, Histoire d’un crime. Déposition d’un témoin (notes et notice par Guy Rosa ; préface de Jean-Marc Hovasse) La Fabrique – novembre 2009
« Malheur à qui resterait impartial devant les plaies sanglantes de la liberté ! » Histoire d’un crime est tout sauf un livre impartial. C’est le récit, à la première personne du singulier, d’un homme qui était à la veille du 2 décembre 1851 un écrivain illustre, académicien, pair de France sous Louis-Philippe, député à l’Assemblée nationale, et qui soudain devient un proscrit. Errant d’appartements d’amis en arrière-salles de marchands de vin, Hugo tente d’organiser la résistance au coup d’État, de soulever le faubourg Saint-Antoine, avec Schoelcher, avec de Flotte, avec Baudin qui s’y fera tuer (« J’aperçus, à cent pas devant nous, au point de jonction de la rue de Cotte et de la rue Sainte-Marguerite, une barricade très basse que les soldats défaisaient. On emportait un cadavre. C’était Baudin. ») Il croise les futurs notables du Second Empire (« Tiens ! me dit M. Mérimée, je vous cherchais. Je lui répondis : j’espère que vous ne me trouverez pas. Il me tendit la main, je lui tournai le dos. ») Il visite les barricades dressées au centre du vieux Paris, « Une à la pointe Saint-Eustache. Une à la Halle aux huîtres. Une rue Mauconseil. Une rue Tiquetonne… Une plus avant dans la rue Greneta barrant la rue Bourg-l’Abbé (au centre une voiture de farine renversée ; bonne barricade)… » Dans la soirée, « je rentrai dans mon asile. J’étais las, j’avais faim, j’eus recours au chocolat de Charamaule et à un peu de pain qui me restait ; je me laissai tomber dans un fauteuil, je mangeai et je dormis.»
Un récit heure par heure d’événements oubliés, un document exceptionnel contre la réhabilitation rampante de Louis Bonaparte.
Quelques rappels sur le régime du Second Empire, sur Wikipédia. Toute ressemblance avec des faits d’actualité ne serait-elle que pure coïncidence ?
- Il (Napoléon III) paralysa toutes les forces nationales garantes de l’esprit public, telles que le Parlement, le suffrage universel masculin, la presse, l’éducation et les associations.
- le suffrage universel masculin était supervisé et contrôlé par les candidatures officielles, par l’interdiction de l’expression libre et par des ajustements habiles des districts électoraux de façon à noyer le vote libéral dans la masse de la population rurale.
- Pour contrer l’opposition des individus, une surveillance des suspects fut instituée.
- De la même manière, l’instruction publique était strictement supervisée, l‘enseignement de la philosophie et de l’histoire fut supprimé au lycée et les pouvoirs disciplinaires de l’administration furent augmentés.
- La passion pour la spéculation fut renforcée par l’arrivée de l’or californien et australien et la consommation fut soutenue par une chute générale des prix entre 1856 et 1870
- Les festivités de la Cour à Compiègne définissaient la mode pour la bourgeoisie, satisfaite par ce gouvernement énergique qui préservait si bien leur équilibre financier.
Je me permets de copier votre article pour étoffer mon dossier sur le totalitarisme face à l’enseignement de l’histoire…
Avec « napoléon le petit », il faut se rappeler Sedan, en 1870…mais aussi la commune de Paris en 1871…et son bain de sang.
J’espère que nous n’irons pas jusqu’à ce point.
Mamouchka.
Merci!
Dommage pourtant, parce que le texte de Hugo le mérite, que cette page ait été écrite sans ouvrir le livre: elle ne déborde pas le titre et la 4° de couverture.
Bonjour,
il est vraiment déplorable de constater que les mêmes éternels poncifs sont répétés ainsi ad nauseum…
déjà, comparer ainsi deux époques totalement différentes va totalement à l’encontre de tout travail historique sérieux, et, concernant Napoléon III et le second Empire, faut-il rappeler que la candidature officielle était déjà pratiquée par la monarchie de Louis-Philippe et qu’elle le fut encore, même si c’était plus « subtilement », par le 3ème République. Faut-il rappeler que l’enseignement de l’Histoire, s’il a été supprimé dans un premier temps, a été rétabli, que le second Empire a ouvert l’enseignement secondaire aux femmes, que l’enseignement primaire a fait de tels progrès que Jules Ferry n’avait presque plus qu’à le rendre obligatoire. Faut-il rappeler à Mamouchka que la Commune de Paris ne s’est pas passée sous le second Empire et que la répression de cette même Commune est le fait des bons républicains qui ont fait tomber l’Empire (exception faite de Gambetta). Faut-il rappeler que la défaite de 1870 est la conclusion logique d’un travail de sape opéré par les opposants à l’Empire qui a conduit à l’affaiblissement de l’armée et à l’isolement de la France sur le plan diplomatique. Je m’arrête là, et je souhaite qu’un jour, on cesse de répéter des contre-vérités et, surtout, de parler de ce qu’on ne connaît manifestement pas. L’Empire, ce n’était peut-être pas le paradis, mais ce n’était certainement pas l’enfer, et quant à parler de totalitarisme, on croit rêver !
Le règne de Napoléon III a commencé par un coup d’Etat sanguinaire, ce qui est l’objet du livre de Victor Hugo. Les opposants se sont retrouvés exilés ou déportés. C’est ce qu’il ne faut pas oublier à notre époque de glorification du bonapartisme.
Wikipédia: « La première moitié du Second Empire est dite de l’Empire autoritaire, tandis que la seconde période est dite de l’Empire libéral. »
Je sais bien que la Commune a débutée après la chute de l’empereur…que sa répression est le fait des « républicains » mais de là à dire qu’ils étaient « démocrates », surtout avec la formation des cadres de l’armée du temps…
Je regrette simplement d’avoir usé d’un raccourci historique, trop raccourci.
Quant à l’enfer, il commence dès que les positions se figent, que l’ascenseur social, la méritocratie disparaissent…et que la notabilité héréditaire s’impose.
Mamouchka.
Sur Agoravox:
Le Président de l’Assemblée nationale réhabilite Napoléon III contre la République (http://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/le-president-de-l-assemblee-68270)
Pour compléter, une lecture plus approfondie de cet ouvrage de Victor Hugo ici: « Victor Hugo, des corps et mise en scène » (http://www.marianne2.fr/philippepetit/Victor-Hugo,-des-corps-et-mise-en-scene_a10.html )